5/1/2016
AMORTISSEUR A PLAT PONT
1- Pourquoi mettre un amortisseur à plat pont ?
Le tableur comme l’expérience montrent que l’adjonction à la chaîne d’un bout amortisseur en textile écrête par son élasticité la tension maximum subie par la ligne de mouillage, comme les ressorts de la suspension d’une voiture passant sur une bosse, diminuant ainsi très significativement le risque de dérapage. Le problème que j’ai observé en étant pris au mouillage dans un ouragan, comme d’autres marins l’ont observé dans des circonstances analogues de tempête, est que dès que les vents deviennent forts à très forts ( coup de vent et au-delà) il est quasiment impossible, malgré toutes les précautions réalisables en pratique, d’empêcher que le ragage sous des tensions très élevées (plusieurs tonnes) dans un chaumard, dans le davier, sur l’étrave ou la sous barbe, inévitable dans les grosses embardées subies dans ces conditions, ne détruise progressivement les protections et le câblot textile lui-même.
L’idée simple que j’ai eue à la suite de mon expérience d’ouragan est de frapper le bout amortisseur sur la chaîne, en arrière du davier et du guindeau, par un nœud de bosse approprié, et de frapper le bout amortisseur étendu à plat pont au taquet arrière du bateau.
Ainsi seule la chaîne qui passe normalement par le davier subit le ragage. Or celle-ci est capable de subir sans dommage des ragages très élevés, ce qui est d’ailleurs la raison essentielle d’utiliser une chaîne pour le mouillage.
Pour mémoire le tableur montre qu’un bout textile (de préférence nylon 3 torons) d’une longueur minimum de 6m a une capacité d’amortissement proche de 80% d’un bout très long, et est donc suffisant.
On se reportera au tableur pour mesurer son efficacité (en fonction de sa longueur et de son diamètre) vis-à-vis d’une ligne de mouillage tout-chaîne et pour choisir son dimensionnement.
Les avantages annexes mais très appréciables de disposer le bout amortisseur à plat pont est sa facilité de mise en place en travaillant à l’aise sur le pont ainsi que la rapidité de son retrait lorsqu’il faut dérader en urgence.
2- Procédure de mise en place
1- Après avoir mouillé frapper provisoirement sur la chaîne à environ 50cm en arrière du davier un bout, par l’intermédiaire d’un nœud de machard rapidement exécuté ou par une main de fer, et frapper ce bout sur le taquet avant. Il ne faut pas frapper la boucle du Machard directement au taquet mais, comme pour la main de fer, le relier par un mousqueton à un bout simple que l’on tourne au taquet. Sinon, au cas où le vent fait que la traction sur la ligne de mouillage dépasse vos forces vous n’arriveriez plus à sortir la boucle du taquet pour défaire le machard et transférer la tension sur le bout amortisseur.
Ceci permet de reprendre la traction de la chaîne et de pouvoir mettre en place tranquillement, sans efforts et sans risques de se blesser, l’amortisseur à plat pont.
2- Etaler à plat pont, du guindeau au taquet arrière du bateau en passant par le passavant, le bout amortisseur, sans encore le tourner au taquet (le bout doit être évidemment suffisamment long pour pouvoir le tourner en sécurité au taquet ensuite).
On veillera à choisir un cheminement, quitte à disposer un ou deux anneaux de friction pour écarter le bout, évitant tout ragage sur les obstacles (ridoirs…). Sur Balthazar deux anneaux de friction suffisent, un au maître beau sur le liston, un juste derrière le nœud de bosse pour remettre la chaîne dans l’axe du davier (il est important de remettre la chaîne dans l’axe du taquet pour éviter qu’elle saute du réa du davier).
3- Frapper le bout amortisseur sur la chaîne avec un nœud de bosse approprié ou par l’intermédiaire d’une main de fer.
Le nœud de bosse que j’utilise est représenté sur la photo. Faire deux tours en arrière puis, en sens inverse, 5 tours en avant et l’arrêter par une ou deux demi clés. Souquer raisonnablement les tours pour qu’ils grippent dès la première traction. Le nœud est très sûr.
L’avantage de frapper directement le bout amortisseur sur la chaîne est de n’avoir aucun risque de difficulté de retrait, ce qui peut arriver avec une main de fer si les efforts ont été tels que l’on a franchi la limite élastique de l’accessoire et qu’il a été déformé (cela m’est arrivé deux fois avec des grosses manilles de mouillage Kong, une fois il a fallu travailler péniblement avec la pince étau, une autre fois il a fallu la scier, on a l’air alors c…idiot s’il faut dérader en urgence). En outre certaines mains de fer introduisent localement des efforts en flexion peu recommandables sur les chaînons faits pour travailler en traction.
Si toutefois vous préférez utiliser une main de fer il faut bannir les mains de fer avec manillon et privilégier les mains de fer s’ouvrant naturellement pour laisser échapper la chaîne si la traction dépasse la limite élastique de la main de fer.
Pour ces raisons la main de fer italienne Osculati me parait, sur le marché actuel, préférable de par sa conception et sa robustesse.
4- Positionner le nœud de bosse ou la main de fer de manière à ce que le bout amortisseur puisse s’allonger sous la traction sans aller s’engager dans le davier.
Si vous avez correctement dimensionné le bout amortisseur à l’aide du tableur il ne s’allongera pas de plus de 10% de sa longueur au repos à la tension maximum du scenario de vents forts que vous avez retenu pour dimensionner votre ligne de mouillage.
En conséquence il faut positionner le nœud de bosse ou la main de fer à au moins 10% de la longueur au repos de votre amortisseur en retrait du davier.
Une fois que vous aurez pris vos repères vous n’aurez plus à réfléchir où le positionner.
Par exemple sur Balthazar le bout amortisseur fait 13m au repos. Je positionne le nœud de bosse à 1,50m (1,30m plus 20cm de marge) en retrait du davier c’est-à-dire, dans le cas de Balthazar qui a une delphinière, à hauteur du taquet avant. Il se trouve ainsi en retrait du guindeau.
En conséquence il faut dégager la chaîne du barbotin pour libérer une boucle de chaîne permettant ce positionnement. Il faut que la longueur de la boucle soit telle que la chaîne reprenne la traction lorsque le bout atteint sa traction max (position à l’allongement 10% de la longueur). Surtout ne pas oublier de la remettre bien engagée dans le barbotin une fois la boucle étalée sur le pont.
5- Souquer le bout amortisseur en vérifiant son bon positionnement et le tourner au taquet arrière.
6- Libérer le bout de manœuvre du Machard ou de la main de fer du taquet avant, ce qui transfère la traction sur le bout amortisseur.
7- Retirer le Machard ou la main de fer du bout de manœuvre qui n’est plus en tension.
Pour larguer le mouillage il suffit d’avaler doucement au guindeau le mou de la chaîne en libérant progressivement le bout amortisseur du taquet arrière jusqu’à ce que la charge soit reprise par le guindeau puis, l’amortisseur étant alors devenu mou, défaire le nœud de bosse ou retirer la main de fer de l’amortisseur.
Une fois que vous aurez fait deux ou trois fois cette opération d’installation vous la ferez machinalement et rapidement, y compris la nuit.
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